Hey, tell me the truth… are we still in the game?

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Voici un bref texte chaotique, une réflexion sur le travail de thèse et sur mon travail de thèse. Je l’écris pour mettre quelques idées au clair ; il tient le rôle de jalon. Nombre de propos tenus ci-dessous évolueront, et seront peut-être contredits dans les semaines à venir.

La thèse

La thèse est une épreuve obligatoire dans un parcours académique. C’est le premier travail de cette taille et à ce niveau de détail. Et c’est souvent aussi le dernier, la suite étant constituée principalement d’articles, de présentations. Quand il y en a, les livres adoptent peu fréquemment le même souci de précision.

Au cours du doctorat, on apprend comment gérer un projet aussi riche et considérable, et on apporte sa contribution à la Science par la même occasion. Ou dans l’ordre inverse. C’est le bizutage inesquivable pour pouvoir tenter sa chance dans une carrière académique (comprendre : essayer de devenir professeur).

Après des années de lecture d’articles et de mise sur pied d’expériences, je rédige. Si tout se passe bien, voici les événements qui m’attendent.

Dans quelques semaines, je vais fournir à mes co-directeurs de thèse, ainsi qu’à un groupe de cobayes (comprendre : des amis), une version finale de ma thèse. Celle-ci va être passée au crible, et donner lieu ensuite à la correction des fautes de sens, à l’amélioration de la clarté du propos, à la suppression de ce qui n’est pas pertinent. Et à la correction des inévitables fautes de langue, ainsi qu’à une diversification du vocabulaire, la thèse étant en anglais.

Puis une version un peu plus finale est imprimée et envoyée aux membres du jury devant statuer sur la thèse. Les membres doivent avoir accepté de juger le travail et s’être mis d’accord sur une date pour la défense (à l’UNIL ça s’appelle le colloque). Ils lisent la thèse et en font un compte-rendu dont je ne prends pas connaissance. Puis la défense, privée, se fait. Elle est courte, mais suivie de nombreuses heures de questions et de discussion. Elle est suivie d’une délibération à huis clos.

Diverses décisions peuvent être prises : l’acceptation, l’acceptation avec des modifications mineures (cas fréquent, c’est pour ça que ce n’était pas une version finale finale), le refus avec réexamen quelques mois plus tard, le refus catégorique. En cas d’acceptation, une défense publique (à l’UNIL on appelle ça la soutenance) est organisée, donnant à nouveau lieu à une discussion, mais plus courte. Si tout s’est bien déroulé, le titre de docteur est octroyé à ce moment-là.

Ma thèse

Après des années de travail, et déjà plusieurs semaines d’écriture (dans sa version actuelle, ma thèse contient une centaine de pages, elle pourrait double en taille d’ici la fin), quelques semaines sont encore nécessaires pour terminer mes expériences, en rendre compte, construire le propos de la thèse autour de ses éléments théoriques et empiriques, procéder au travail d’édition et à celui de relecture. En résumé, une application inévitable de la règle de (Barrass, 1991) que j’ai découverte dans (Chandrasekhar, 2002) et qui résume le travail de recherche à “think – plan – write – revise”. [En aparté : pour préparer le travail de thèse, je ne peux que recommander la lecture de ce dernier article, ainsi que celle du livre “How to write a lot” de Paul J. Silva et de la brochure “Bien démarrer sa thèse”.]

Ma thèse se situe dans le domaine des “mathématiques appliquées aux sciences humaines et sociales”. En particulier, j’étudie la structure adoptée par les personnages dans une narration littéraire. Par exemple, je montre comment un personnage peut acquérir de l’importance en n’apparaissant qu’en même temps que des personnages secondaires. En apparaissant avec nombre d’entre eux, il joue un rôle de personnage incontournable, ou “central”. Il fait le lien dans le propos de l’auteur entre les situations qui impliquent lesdits personnages. C’est un des résultats que l’on peut mettre en évidence lorsqu’on étudie ces structures. Pour y parvenir dans notre travail, nous utilisons un index de personnages tel qu’on en trouve fréquemment dans les dernières pages d’une oeuvre classique (voir les exemplaires qui sortent aux éditions La Pléiade). Nous en extrayons un réseau sur la base des co-occurrences des personnages, c’est-à-dire en identifiant quand ils apparaissent ensemble, ce qui nous offre une vision dynamique des relations entre les personnages. Le réseau extrait est un modèle des relations entre personnages dans la narration. Il existe divers moyen d’en construire. Et même, dans notre cas particulier, il variera sensiblement en passant d’une édition à une autre.

Les relations se situent au niveau de la narration, c’est-à-dire de ce que nous lisons, de la représentation que l’auteur fait des événements. Nous sommes ici au coeur de la thèse : nous étudions comment les personnages vivent la transformation du récit (les “faits”) en une “narration”. Nous étudions la représentation choisie par l’auteur, et ses conséquences.

À suivre

Arrêtons-nous pour aujourd’hui à cette brève description de mon sujet de thèse. Nous développerons prochainement son contenu et sa construction : comment la revue de littérature et la description des moyens nécessaires d’une part, la création du réseau, l’identification des rôles et l’étude des processus dynamiques d’autre part, sont articulés autour d’un chapitre franchement original décrivant les enjeux, le cadre et le fonctionnement de la “literary network analysis”, à ce stade l’apport principal de ma thèse.

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